« Chacun cherche son Serge »
« Les Serge (Gainsbourg point barre) »
Adaptation et mise en scène Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux.
Du 24 novembre 2022 au 8 janvier 2023 au Studio-Théâtre.
Photo ©Vincent Pontet
Sébastien Pouderoux. Un esprit brillant et acéré. Un être profondément inspiré et inventif.
Stéphane Varupenne. Un artiste timide, sensible et paradoxal qui se cachait derrière sa froideur et son agressivité mais aussi derrière des volutes de fumée et des vapeurs d’alcool. La chanson, qu’il considérait comme un art mineur, le complexait moins que la poésie ou la peinture.
Sébastien Pouderoux. Il me fait penser à Dylan, capable, comme lui, d’écrire dans l’urgence. une sorte de vanne ouverte… Imaginez-vous que Je t’aime… moi non plus et Je suis venu te dire que je m’en vais ont été achevés en une nuit…
Stéphane Varupenne. Je pense que c’est ce qui caractérise la plupart des poètes.
Sébastien Pouderoux. On aurait tort de croire qu’il n’a souffert qu’à ses débuts, quand il cherchait désespérément la reconnaissance. Le succès n’a pas eu pour vertu de le rassurer. En réalité, cela le détruisait, tout en lui apportant cette liberté de ton qui fait qu’aujourd’hui encore on a du plaisir à l’écouter
Stéphane Varupenne. C’est tout simplement sa façon de séduire.
Sébastien Pouderoux. Oui, il entre dans une forme de défiance qui crée un mystère autour de lui. Son attitude faussement dégagée ou carrément hostile lui donne un côté magnétique. On pourrait se demander si ce n’est pas sa manière de se protéger, son mécanisme de défense.
Stéphane Varupenne. Oui, il empruntait des thèmes classiques et en faisait des chansons. C’est un peu l’inventeur du sample. De plus, il était curieux de tout, s’essayait à tous les styles : le jazz, le rock, le reggae, l’électro… Il n’a jamais cessé d’évoluer.
Sébastien Pouderoux. Il disait que la provocation était une nécessité et qu’en secouant les gens, il en tombait toujours quelque chose, des pièces de monnaie, un livret de famille, etc. Dans Les Serge, notre intention n’est pas du tout de choquer ou de déstabiliser mais plutôt d’interroger le spectateur, d’éveiller sa curiosité.
Sébastien Pouderoux. Depuis Comme une pierre qui… [spectacle créé au Studio-Théâtre en 2015 d’après Greil Marcus par Marie Rémond et Sébastien Pouderoux], Stéphane et moi avions envie de retravailler ensemble. Gainsbourg est, depuis toujours, une grande source d’inspiration alors quand Éric Ruf nous a fait cette proposition, nous l’avons acceptée. Le défi était de s’affranchir de la forme cabaret, un exercice avec lequel Gainsbourg était loin d’être à l’aise, pour aller vers le concert, qui lui correspond mieux.
Stéphane Varupenne. Nous sommes cinq comédiens-musiciens et une comédienne-musicienne ; ce spectacle est l’occasion rêvée de créer un groupe.
Sébastien Pouderoux. Une sorte de concert stand-up. Nous interprétons des chansons et des extraits d’interviews. D’un côté, il y a la musique, de l’autre, il y a l’homme avec sa répartie en interview, son esprit irrévérencieux et subversif. Tout ce qui fait l’intérêt de le fréquenter à travers un spectacle.
Stéphane Varupenne. On pourrait penser à une ultime répétition la veille d’un concert. Notre volonté est d’explorer davantage l’envers du décor, la part intime et confidentielle de Gainsbourg…
Sébastien Pouderoux. Nous avons privilégié le Gainsbourg amoureux et sensuel.
Stéphane Varupenne. En une heure vingt de spectacle, on ne peut donner à entendre qu’une infime partie de son immense répertoire. Nous avons accordé une place importante à tous ses morceaux emblématiques que la nouvelle génération ne connaît pas forcément.
Sébastien Pouderoux. Aucun de nous n’est en charge d’une période précise de la vie de Serge Gainsbourg. On pourrait imaginer un sous-titre : Chacun cherche son Serge. À chaque acteur ou actrice d’investir la partition à sa manière et de trouver en soi le provocateur, le subversif, le timide ou l’inhibé.
Stéphane Varupenne. Par moments, c’est assez compliqué d’avoir du recul. C’est en cela que le binôme est précieux. Pour la musique, nous enregistrons nos sessions, ce qui nous permet davantage d’exigence. Nous sommes également très aidés par nos arrangeurs.
Sébastien Pouderoux. Non, pas vraiment. La personne en charge de ces deux séquences les interprète avec beaucoup de délicatesse. Il s’agit davantage d’une citation que d’une volonté d’incarner ces provocations.
Stéphane Varupenne. Nous les détournons pour que cela reste un clin d’œil…
Sébastien Pouderoux. Lorsqu’il interprète une chanson inédite, La Noyée, sur un plateau de télévision. J’aime l’absence d’affectation. On ressent moins le pathos que chez Brel ou Ferré par exemple. Cela me touche énormément.
Stéphane Varupenne. En 1985, il est l’invité du Jeu de la vérité. Il reprend au piano Parce que, une chanson de Charles Aznavour. C’est un moment suspendu qu’il s’emploie ensuite à faire voler en éclats en répondant à Patrick Sabatier. Pour moi, c’est tout Gainsbourg, quelqu’un qui ne cesse de casser l’émotion.
Stéphane Varupenne. L’impression d’avoir entrevu l’âme d’un poète, comme dans la chanson de Charles Trenet. Et qu’il lui reste un air ou une parole en tête.
Sébastien Pouderoux. Le sentiment d’avoir fréquenté Gainsbourg à travers nous.
Propos recueillis par Oscar Héliani
avril 2019
Spectacle créé le 16 mai 2019 au Studio-Théâtre
Le spectacle Les Serge (Gainsbourg point barre) a été adapté en film original tourné au Studio Ferber : La Comédie-Française chante Gainsbourg. En 2021, ce film a été diffusé sur France télévisions et l’INA l’a édité en DVD (en vente à la boutique de la Comédie-Française).
Les Serge (Gainsbourg point barre)
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POUR LA SAISON 24-25
En raison du renforcement des mesures de sécurité dans le cadre du plan Vigipirate « Urgence attentat », nous vous demandons de vous présenter 30 minutes avant le début de la représentation afin de faciliter le contrôle.
Nous vous rappelons également qu’un seul sac (de type sac à main, petit sac à dos) par personne est admis dans l’enceinte des trois théâtres de la Comédie-Française. Tout spectateur se présentant muni d’autres sacs (sac de courses, bagage) ou objets encombrants, se verra interdire l’entrée des bâtiments.